« Cachez ce téléphone neuf, que je ne saurais voir ! », aurait pu dire Molière, s’il était né au XXIe siècle. D’après des chercheurs, la fabrication d’un smartphone neuf consommerait autant d’énergie que son utilisation pendant une décennie entière (source). En quelques années seulement, ils sont en effet devenus l’appareil électronique grand public qui génère le plus de gaz à effet de serre.
Alors que plus de la moitié de la population mondiale utilise quotidiennement un téléphone, le désastre environnemental pointe le bout de son nez. Heureusement, l’obsolescence n’est pas une fatalité ! Décryptage de l’impact d’un téléphone neuf face à un téléphone reconditionné.
Neuf vs. reconditionné : le match
La fabrication : 1-0 pour le reconditionné
La fabrication d’un téléphone est responsable d’environ 80 % de sa dette environnementale. Plomb, graphite, magnésium, cuivre, or, lithium, silicium,… un smartphone contient 16 des 17 métaux et terres rares que comptent notre planète. En moyenne, 44 kg de roche doivent être extraites pour donner les 130 grammes de minéraux et métaux rares qui se trouvent dans votre smartphone. Ces matières premières doivent ensuite être transformées, produisant à leur tour une série de désastres écologiques. Le travail de l’or libère, par exemple, du cyanure et du mercure qui est ensuite évacué dans les rivières.
Par ailleurs, la majorité des téléphones sont jetés avant même de tomber en panne. Leur offrir une seconde vie, c’est donc permettre d’éviter une fabrication coûteuse pour le porte-monnaie, comme pour l’environnement. En effet, de nombreux smartphones de retour en usine demandent seulement des réparations mineures (voire… rien du tout), ou le remplacement de certaines pièces, généralement l’écran ou la batterie. En moyenne, l’impact d’un téléphone reconditionné est donc trois fois inférieur à la production d’un nouvel appareil.
Le transport : 2-0 pour le reconditionné
Une fois les matières premières extraites et transformées aux quatre coins de la planète, les composants d’un téléphone neuf sont généralement assemblés en Asie du Sud-Est, pour être distribués à travers le monde. En vrai globe-trotteur, votre smartphone a déjà fait plusieurs fois le tour du monde avant d’arriver chez vous.
À l’inverse, les sociétés de reconditionnement cherchent au maximum à se fournir à l’échelle nationale ou européenne – même si la faible disponibilité des stocks les contraint parfois à sortir du continent – puis reconditionnent les appareils dans des usines locales avant de les re-distribuer sur le territoire. Seules les pièces de rechange sont importées d’Asie, avec un impact finalement moindre que pour un téléphone neuf.
Le recyclage : 3-0 pour le reconditionné
Au-delà de la fabrication, l’élimination d’un appareil en fin de vie pose également problème. Un smartphone est composé, en moyenne, de 40 % de plastiques, souvent mélangés à d’autres produits chimiques qui compliquent son recyclage. Une grande partie des pièces de votre téléphone terminent donc leur vie dans une décharge, où ils continuent de contaminer l’eau et les sols.
L’ADEME indique que la durée de fonctionnement potentielle d’un téléphone est d’une dizaine d’années, et trois ans pour la batterie. Acheter un produit reconditionné, avec une batterie neuve, permet de faire gagner quelques (précieuses) années de vie à un appareil avant de l’envoyer au recyclage.
Résultat ? Le reconditionné gagne par KO. Choisir un téléphone de seconde main, c’est limiter son empreinte environnementale lors de la production, mais aussi de la destruction. Les téléphones reconditionnés ont également l’avantage d’être contrôlés, de fonctionner avec tous les opérateurs, mais surtout d’être plus accessibles : un téléphone reconditionné est jusqu’à 70% moins cher qu’un smartphone neuf.
Tour du monde de l’impact d’un téléphone neuf
Imaginé et conçu aux Etats-Unis, composé de matériaux venus du monde entier, assemblé en Chine, puis trop souvent jeté dans des décharges sauvages en Afrique… de sa fabrication à sa fin de vie, un smartphone fait quatre fois le tour du monde. Aperçu de ses escales.
Bienvenue… au Chili. Le Salar d’Atacama au Chili détient environ 45 % des réserves mondiales de cuivre, nécessaires à la fabrication du lithium présent dans les batteries. Pour obtenir une tonne de lithium, deux millions de litres d’eau doivent être puisés dans les nappes phréatiques et évaporés. Un travail qui assèche une région déjà pauvre en eau, met à mal la biodiversité et est responsable de la baisse de la population des flamands roses locale.
Bienvenue… en République Démocratique du Congo. Ce pays est le premier producteur mondial de coltan, indispensable au bon fonctionnement des composants électroniques. La majorité du trafic de ce précieux minerai est contrôlée, depuis des années, par des groupes armés pour financer la guerre civile. Des groupes qui font également travailler les populations locales dans des conditions épouvantables, dénoncées par plusieurs ONG.
Bienvenue… en Amazonie. Dans la plus grande forêt du monde, l’extraction d’or est l’une des principales causes de la déforestation. Car la spécificité des mines, c’est qu’elles se situent au milieu des forêts, et atteignent donc le cœur des écosystèmes. Et ce n’est pas tout, l’extraction de l’or génère aussi des déchets de mercure et de cyanure qui contaminent les eaux. Aïe.
Bienvenue… au Ghana. Dans ce pays, la décharge d’Agbogbloshie est l’une des principales décharges électroniques sauvages du monde. De nombreux pays se débarrassent de leurs déchets toxiques dans ces zones à ciel ouvert, où les travailleurs mettent leur vie en danger en cherchant à récupérer et en brûlant les métaux rares.Malgré une prise de conscience croissante de l’impact environnemental des activités humaines, la fabrication et le recyclage d’un smartphone est un problème qui n’est pas encore suffisamment pris au sérieux. Alors même que l’on sait que la quantité d’émissions de CO2 et les besoins en métaux rares augmentent avec chaque nouveau modèle. Heureusement, le monde du reconditionné offre une alternative viable, permettant de continuer à bénéficier des dernières avancées technologiques, tout en limitant son impact sur la planète et les écosystèmes.
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